La littérature à l’épreuve de sa transculturation. Acteurs, espaces, relais, manifestations

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VENDREDI 4 ET SAMEDI 5 FÉVRIER 2022, Les Lilas

La littérature à l’épreuve de sa transculturation

Acteurs, espaces, relais, manifestations
Rencontre transnationale et transdisciplinaire

en collaboration avec Ville des Lilas, l’ETP Est ensemble, la Fondation Michalski, l’Observatoire européen du Plurilinguisme, la revue L'Atelier du roman, l’Association de bibliothécaires de la Seine-Saint-Denis, les festivals Poestate, Versopolis, Italiques, la maison d’édition Transignum, l’Institut du Tout monde, la revue ViceVersa

Argumentaire

A l’heure des écritures migrantes, de la littérature 2.0, des écritures transmédiales, des fanfictions et autres avatars de l’auto-fiction, se rejoue la nécessité de repenser la chaîne de valeur en la mettant à l’épreuve d’une nouvelle conception du monde : la transculturation. Ce terme que l’on confond souvent avec interculturel et multiculturel, peut être considéré comme une théorie du métissage mieux à même de saisir le choix et la circulation des acteurs nouveaux autant que les œuvres littéraires par leur support de prédilection : le livre. Ce choix est le résultat d’une convergence entre plusieurs acteurs. Le premier d’entre eux, est, bien sûr, l’écrivain qui, par son travail et sa sensibilité, interprète et matérialise, par l’écriture, son rapport au monde. Cette vision singulière, l’écrivain la propose ensuite à l’éditeur qui la valide – ou pas – en y engageant son nom.

C’est le deuxième maillon de la chaîne. Mais l’éditeur est partie prenante d’un milieu où se croisent les autres acteurs de la chaîne : l’agent littéraire, l’attaché de presse, le webmestre, le diffuseur, le distributeur, le critique journalistique, le bibliothécaire, l’universitaire, l’association littéraire, la revue, l’association de gestion des droits d’auteur, le juriste, le libraire et, last but not least, le lecteur, le maillon le plus important. Chacun de ces maillons interprète et influence à son niveau autant le choix que la défense et la circulation de l’œuvre. L’offre et la demande sont ainsi, en théorie, en interaction constante au sein d’une aire linguistique qui est d’abord nationale (mais pas toujours) avant que l’œuvre littéraire puisse se transporter dans un autre espace linguistique par le succès d’estime ou de tirage qu’elle aura obtenu.

Telle est la chaîne du livre classique. L’interaction qui s’y déploie est complexe même si le déterminant majeur (induite par l’idéologie en cours) demeure jusqu’ici le déterminant économique. On a souvent épilogué sur l’ascendant pris par la direction financière sur la direction éditoriale. La quantité prime sur la qualité. Air connu.

Mais voici que la crise du COVID-19, qui est une crise du consumérisme, mais aussi une crise de l’espace public au sens propre (distanciation physique) et figuré (crise de l’autorité au sens étymologique), met à plat ce dogme et nous oblige à réfléchir à ce qui constitue la chaîne de valeur dans un nouvel espace devenu transnational par le biais d'un nouveau langage : le langage-machine.

Dans cette configuration, que pèse la communauté virtuelle que l’auteur forme avec le lecteur ? Quel lien a-t-elle avec la République des Lettres ? Est-elle toujours nationale ? Peut-elle contribuer à infléchir le sens de la chaîne de valeur autour de la littérature dans le labyrinthe numérique dans lequel on nous divertit ? L’espace numérique est-il une chance pour l’écrivain en lui permettant de s’adresser directement à son public ou un miroir aux alouettes instrumentalisé par les GAFAN ?

 

VENDREDI 4 FÉVRIER

9h00 : café, accueil et inscriptions

9h30 : ouverture du colloque : Lionel Benharous (Maire des Lilas), Fulvio Caccia (Président de Linguafranca).

10h00 : Introduction. Les enjeux de cette rencontre.

En s’émancipant à la fin du XVIIIe siècle de l’antique corpus des Belles-Lettres et de ses liens directs avec les pouvoirs, la littérature affirmait tout à la fois son autonomie (Bourdieu) comme son intégration à l’écosystème libéral de création de la valeur. Au fil des époques, elle en a illustré les grandeurs et les servitudes. Mais qu’en est-il aujourd’hui à l’heure de la pandémie et de l’état d’exception ? Le silence est depuis longtemps la réponse assourdissante de l’écrivain à une époque où sa voix ne porte plus. La précarité de l’écrivain n’est pas nouvelle. Mais au-delà, c’est l’espace public qui a muté. Le livre, l’écrit ne l’ordonnent plus dans l’espace dit national. Dans cet univers incertain, où l’offre est pléthorique, les conditions de travail dégradées, une nouvelle narration universelle, globale, est-elle possible ? Comment les modèles du passé nourrissent-ils notre présent ? Et pourquoi mettre en lumière aujourd’hui, les écrivains, transfuges linguistiques. Quel est le rôle d’une agence littéraire aujourd’hui ? Doit-elle se contenter de mettre en rapport des écrivains d’ici et d’ailleurs, confirmés ou pas, avec des éditeurs nationaux et/ou alors contribuer à désigner les acteurs transnationaux de la chaîne de la valeur du livre ? (Fulvio Caccia)

10h15-11h30 : Table ronde 1. L’espace littéraire en crise : du national au transnational

L’espace littéraire est en crise. Le confinement induit par le COVID-19 le révèle au sens propre et figuré. Mais qu’est-ce que l’espace littéraire qui recoupe en bonne partie l’espace public ? Si l’espace public/littéraire est celui de la délibération et de l’expression, entre l’espace commun (lieu de circulation) et l’espace politique (lieu de décision), comment fonctionne-t-il aujourd’hui sous la houlette du numérique ? Cet espace public est-il toujours national ? Est-il devenu de fait transnational ? Qu’est-ce qu’un écrivain national ? Un écrivain est-il assigné au pays qui l’a d’abord reconnu, même s’il est étranger ? Dans ce cas, quelle place pour l’écrivain transnational ? Doit-il, pour être reconnu, endosser les habits de l’exotique ou, au contraire, doit-il s’en démarquer par une pratique éclectique de son art ? Aujourd’hui, comment arracher à la société du spectacle les possibilités d’usage qu’elle a capturées ? « La profanation de l’improfanable » (Giorgio Agamben) est-elle la tâche politique et esthétique de l’écrivain de nos jours ?

Modérateur : Fulvio Caccia

Intervenants :

Mia Lecomte (poète et écrivaine italienne)

Marie Costa (traductrice littéraire du catalan, élue d’Amélie-les-Bains)

Jacobo Machover (écrivain d’origine cubaine)

Laura Toppan (maître de conférences, Université de Lorraine)

Discutante : Evelyne Abitbol (auteure de Rilke, l’Andalou, ancienne Conseillère à la Diversité culturelle du Chef de l’Opposition de l’Assemblée nationale du Québec)

 

11h30-11h45 : Pause-café et librairie éphémère

11h45- 13h15 : Table ronde 2. Tradition/Traduction 

Tradition, trahisons ? La traduction littéraire à l’épreuve de son automation

Aujourd’hui l’écrivain qui souhaite faire connaître son travail auprès d’un autre public que celui auquel il était initialement destiné, possède diverses options. Il peut attendre d’obtenir la reconnaissance nationale via son éditeur qui vend ensuite ses droits à l’étranger. S’il appartient à une minorité linguistique marginalisée, il peut s’auto-traduire ou demander à un traducteur de le faire. Enfin, il peut utiliser un traducteur automatique suivi d’une révision. Ces dispositifs de traduction avancent à grands pas. Sont-ils un piège pour les traducteurs littéraires ou peuvent-ils ouvrir de nouveaux usages ?

Modérateur : Christian Tremblay (Président de l’Observatoire européen du Plurilinguisme)

Intervenants :

Claire Larsonneur (maître de conférences, la traduction littéraire automatique)

Paola Appelius (Présidente de l’Association des traducteurs littéraires de France)

Jean-Gabriel Ganascia (philosophe, spécialiste de l’intelligence artificielle)

Discutant : David Ferré (Actualités Éditions)

 

13h15-14h45 déjeuner

15h00-16h30 : Table ronde 3. Revues numériques, festivals, agences transdisciplinaires : nouvelle chaîne de valeur du livre ? 

Malgré ses dérives, la mutation numérique de l’espace public est-elle une fenêtre d’opportunité pour les nouveaux acteurs de la chaîne du livre ? Mais qui sont-ils ? Où sont-ils ? Que veulent-ils ? Que valent-ils ? Blogs, revues, festivals, trans-éditions : quelle interaction entre le papier et le numérique ? Que valent les sites littéraires numériques ? Quel est le point d’équilibre ? Quelle place pour les transfuges linguistiques ?

Modérateur : Hafid Gafaiti (écrivain américano-algérien, directeur de collection)

Intervenants :

Gisèle Sapiro (Directrice de recherche à l’EHESS)

Sébastien Zaegel (festival Hors limites. Association des bibliothèques en Seine-Saint-Denis)

Carole Mesrobian (Recours au poème, revue en ligne, Les éditions Transignum)

Biswadip Chakraborty (directeur de The Antonym, webmagazine littéraire, Calcutta)

Johan Faerber (écrivain, Diacritik, revue en ligne)

Discutante : Catherine Pont-Humbert (écrivaine, journaliste)

 

 18h00-19h30 : Symphonie des voix du monde : Lecture-improvisation

Les  écrivains et les lecteurs présents sont invités à lire un bref extrait d’une œuvre choisie. La lecture sera suivie par une improvisation. Ainsi, les interprètes réciteront une phrase ou deux de leur texte selon les indications du chef d’orchestre. Un saxophone accompagnera le fil narratif de ces voix tissées qui peut prendre aussi la forme d’une danse. Synesthésie générale, où le texte, l’image et le mouvement deviennent une symphonie singulière et plurielle.

Chef d’orchestre : Davide Napoli (poète et performeur)

 

SAMEDI 5 FÉVRIER, JOURNÉE GRAND PUBLIC

La littérature transnationale et ses publics

Nous aborderons, dans ce temps dédié au public, différents aspects de la littérature monde contemporaine : le défi de la nouvelle économie dans laquelle se situe le thème contemporain dominant de "la beauté". Comment est-elle affrontée dans cette littérature ? Enfin, un focus sur une zone géographique emblématique des écartèlements nationalistes : les Balkans

9h00 : Accueil

9h30-11h00 : Table ronde 4. La littérature et les défis de la nouvelle économie de l’attention

Dans la nouvelle économie de l’attention, le livre a de nouveaux concurrents, ce sont les réseaux sociaux, bien sûr, un monstre à mille têtes qui marche aussi sur ses brisées : l’écrit. Bien que malmené, le livre conserve néanmoins l’onction de la légitimité intellectuelle. Mais à l’intérieur de sa propre fabrique, les rapports sont  tourneboulés, voire inversés. Aujourd’hui, c’est le distributeur qui impose sa loi à l’éditeur l’obligeant à se spécialiser. Le repérage rapide et facile des livres est devenu un enjeu essentiel dans les libraires trop exiguës pour absorber une offre pléthorique : plus de 15 000 nouveautés par an. L’homogénéisation de l’offre en est la conséquence logique. Pour la littérature générale et notamment pour le roman ce sont les éditeurs pouvant afficher des auteurs « bankables » qui tirent leur épingle du jeu. Et pour cause. Non seulement ces derniers servent de tête de gondole pour les lecteurs mais aussi pour les jeunes auteurs les plus désireux de se faire connaître. Dans cette polarisation extrême, induite par le marché, quelles pistes explorer pour les éditeurs ? Comment faire connaître des auteurs hors-cadre, transdisciplinaires, et notamment des écrivains transfuges linguistiques ? Bref, quels nouveaux usages pour l’édition ?

Modérateur : Fulvio Caccia (écrivain)

Intervenants :

Antoine Spire (écrivain, journaliste et directeur de la collection « Le bord de l’eau »,

Président du Pen club français)

Hafid Gafaiti (poète américano-algérien, directeur de la collection « Études transnationales francophones et comparées »)

Linda Maria Baros (poète, éditrice, revue La Traductière)

Discutant : Fernando Baros (librairie Tschann, sous réserve)

 

10h45 : Pause-café

 11h00-12h30 : Table ronde 5. Les Balkans : des littératures en ébullition

 (en partenariat avec « L’Observatoire de la diversité culturelle »)

Trente ans après les conflits militaires et la chute de l’empire soviétique qui ont créé de nouveaux États-nations, il s'agira de questionner la littérature des Balkans aujourd’hui. Où en est-elle dans ses thématiques et dans ses instrumentalisations nationales. Quelles sont les langues d'expression des écrivains et quelle est leur volonté d'échapper à leurs assignations nationales dans leurs œuvres ?

Modérateur :

Pascal Hamon (fondateur du « Salon du livre des Balkans »)

Intervenants :

Elitza Gueorguieva (romancière, performeuse, franco-bulgare)

Velibor Colic (écrivain, France/Bosnie-Herzegovine)

Nina Zivancevic (écrivaine et traductrice, France/Serbie)

Brankica Radic (traductrice du domaine croate)

Nedim Gursel (écrivain d’origine turque, sous réserve)

Discutant : Giuseppe Samonà (écrivain, auteur de La frontiere spaesata, un viaggio alle porte dei balcani)

 

Déjeuner : 13h00-14h30

 

14h30-15h00 : Shakespeare, écrivain transculturel

Conversation en visio-conférence avec Lamberto Tassinari (auteur de John Florio alias Shakespeare. En partenariat avec le magazine en ligne ViceVersa)

 

15h00-16h45 : Table ronde 6. L’écrivain à l’épreuve de la beauté

Qu’est-ce que la beauté ? Y a-t-il une universalité de la beauté ? Comment le transfuge linguistique la décline-t-elle dans sa langue d’écriture ? « L’écrivain moderne » l’a souvent maintenue à distance, parce qu’il croyait, non sans raison, qu’elle était le lieu de tous les clichés et de la morale de l’époque. Ses transgressions qui, hier encore, signaient une originalité, ne le sont plus nécessairement aujourd’hui, récupérées systématiquement par « la société du spectacle » (Guy Debord). Mais dès lors, à quoi sert-elle ? Et à quoi sert l’écrivain qui entend la défendre ? Quelle serait sa reconnaissance ? Ce dernier aura-t-il encore une place dans la vie collective qui exigera bientôt de lui non plus «… le jamais-dit, mais qu’il rende belle la répétition et aide l’individu à se confondre, en paix et dans la joie, avec l’uniformité de l’être. Car l’histoire de l’art est périssable ? » (Kundera)

Modératrice : Francesca Isidori (journaliste littéraire)

Intervenants :

Jean-Philippe Domecq (écrivain, essayiste, auteur de Qui a peur de la littérature ?)

Pavel Hak (romancier d’origine tchèque)

Jean-Yves Masson (écrivain, poète, traducteur, président de la Maison des écrivains)

Andréas Becker (écrivain d’origine allemande)

Discutante : Anne de Commines (poète, Directrice de collection éditions Unicité)

 

17h00 : Conclusion brève et remerciements

 

Vidéo complète (6 parties) :

Quelques images :

 

 

 

 

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